Ce samedi 29 juillet s’est tenu au Raizet une réunion entre les chefs d’édilité des Régions et territoires ultramarins (voir notre article p.).
Ce mini-sommet intervient non seulement peu de temps après le comité interministériel (CIOM) présidé par la première ministre mais surtout après le récent remaniement qui a vu la nomination de Philippe VIGIER à la rue Oudinot.
Nomination qui avait suscité la grogne dans les rangs des parlementaires d’outremer et pour un certain nombre d’acteurs économiques pour qui ce changement entraînait de facto une remise en cause des relations et des projets commencés par l’ancien ministre délégué Jean-François CARENCO. Qui pour rappel, comme ses prédécesseurs ne donnait pas le « la », dans les politiques outre-mer.
Nonobstant, les dirigeants de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane, de Saint-Martin mais également de Mayotte se sont réunis afin de débattre des suites du CIOM et des conséquences de ce nouveau paysage politique. Si le président Chalus se félicitait de la présence pour la première fois de Saint-Pierre et Miquelon, on note l’absence de la présidente de région de l’île de la réunion, la communiste Huguette BELLO.
Pour autant, cette union de circonstance pour parler d’une même voix sur les sujets transversaux des outremers est le signe d’un changement de méthode. On se rappelle bien des périodes où chaque président, chaque parlementaire d’outremer profitait de ses relations « privilégiées » à Matignon ou à l’Élysée pour faire valoir son entregent.
On ne peut ici ne pas citer St-Mathieu : « tout royaume divisé contre lui-même court à sa ruine » ? Ary CHALUS, fin connaisseur des principes bibliques n’a eu de cesse de rappeler que l’outremer « pesait » 2,6 millions d’habitants et que si le soleil ne se couche jamais en France, c’est grâce aux territoires d’outre-mer.
Et de réclamer directement au président de la République moins de paternalisme, de la considération et le respect des promesses faites. Ainsi, les mesures concrètes, annoncées au cours du CIOM devront s’appliquer dans les plus brefs délais afin qu’on en évalue rapidement les effets. Toujours remettre l’Outremer aux calendes grecques, n’est plus acceptable !
L’idée-force de ces rencontres est de réunir et de rassembler tout l’outremer de l’Atlantique à l’Océan Indien en passant par le Pacifique, et même la Corse qui doit également résoudre des problématiques qui nous sont communes.
Au fond, en tentant de parvenir à une forme d’unité représentative, les présidents de ces territoires cherchent bien à sortir de relations de dominations paternalistes, colonialistes, niant leur capacité à décider par eux-mêmes et pour eux-mêmes. Il s’agit de briser la verticalité des oukases Parisiens afin d’établir des nouvelles relations horizontales où les outremers seraient compris comme des partenaires plutôt que des vassaux. Serge LETCHIMY, président de la CTM de Martinique précisait : « C’est un beau combat que nous entreprenons. Ce qui est important pour nous c’est l’unité. Si jusqu’ici nous faisons face à des attitudes dévalorisantes, méprisantes et même condescendantes de l’État, c’est justement parce que nous n’avons pas su afficher notre unité ». Une logique partagée d’où l’intérêt nouveau que porte Saint-Pierre et Miquelon ou la Corse à ce regroupement des forces des outremers.
La question en toile de fond qui est posée est celle de la prise en compte réelle par l’État d’une gouvernance adaptée à chaque territoire en fonction de ses besoins, des réalités locales et des souhaits de ses dirigeants.
Et Serge LETCHIMY de pousser aux fers : « nous sommes déterminés à aller vers plus de différenciation des politiques publiques, plus de responsabilités locales, pour parvenir à un vrai progrès ». Les rédacteurs du courrier adressé au président de la République le pressent de confirmer son accord donné le 7 septembre 2022, notamment à travers la prochaine révision constitutionnelle envisagée dès le début 2024. Il s’agit selon Emmanuel MACRON de prendre acte du terme des accords de Matignon sur l’avenir de la Nouvelle Calédonie.
Et dans une stratégie désormais plus réaliste, voire plus pragmatique rien d’étonnant que les présidents des Outremers sortent de l’affect. Et interpellent directement le président de la République gardien de nos institutions. Vaut mieux parler à Dieu qu’à ses saints ! La volonté de tous me semble-t-il, est finalement d’avoir une relation directe avec celui qui incarne l’État.
Après l’appel de Fort-de-France, le Congrès des élus de Guadeloupe, le chemin vers une adaptation concertée de nos institutions et une évolution de notre mode de gouvernance semble dorénavant balisé à l’issue de cette réunion. Pas après pas, l’édifice se construit. Une bonne chose de faite !
RJC