Le recours contestant l’arrêté du préfet de la Guadeloupe imposant le port du masque a été rejeté par le juge des référés par une ordonnance du 18 septembre.
C’est inquiétant pour les libertés publiques. Les restrictions apportées aux libertés ne doivent en effet pas être disproportionnées par rapport aux considérations qui les motivent. Et c’est, d’autre part, surprenant au regard de la position exprimée par le juge des référés du Conseil d’Etat le 6 septembre. Celui-ci, statuant sur les appels du ministre de la santé des ordonnances des TA de Strasbourg et Lyon, considère que si le port du masque peut être imposé sur des zones larges, afin que cette obligation soit cohérente et facile à appliquer pour les citoyens, ces périmètres étendus doivent être délimités – et se justifier – par l’existence de plusieurs zones à fort risque de contamination. Le port du masque peut ainsi être imposé sur l’ensemble d’une ville densément peuplée (comme Lyon ou Villeurbanne) mais doit être limité au centre-ville dans les communes moins denses.
Le préfet de Guadeloupe impose le port du masque, du 9 au 29 septembre, à toute personne âgée de onze ans et plus dans toutes les rues où se trouvent une école élémentaire, un collège, un lycée, un établissement d’enseignement supérieur ou un établissement de formation professionnelle ;/ dans toutes les rues où se trouvent les établissements suivants : tout type de commerces de vente et de réparation, y compris les marchés couverts et ouverts, les lieux de vente à emporter / les établissements à vocation commerciale destinés à des expositions ou à des salons/ les administrations et les banques/les restaurants et les débits de boissons/ les établissements sportifs couverts et de plein air, les stades et les hippodromes/les pharmacies, les cabinets médicaux et les établissements de santé ;/ les établissements de culte/les gares routières et maritimes ainsi que les aéroports/ les salles d’auditions, de conférences, de spectacles et de cinémas, les musées et les établissements d’enseignement artistique,/ les salles de jeux.
Cette longue énumération à la Prévert, qui concerne toutes les communes même les moins peuplées et ne délimite pas de périmètres à risque fort de contamination pose juridiquement question. Quelles sont les rues où la liberté d’aller et venir et le droit au respect de sa vie personnelle et donc de circuler sans masque demeurent ? Il serait intéressant de le savoir mais il ne doit pas y en avoir beaucoup. L’arrêté du préfet fait de l’exception consistant à limiter les libertés une règle et c’est bien là le problème.
La Guadeloupe ne compte pas de villes d’une densité comparable à Lyon ou Villeurbanne qui dépassent respectivement 500.000 et 150.000 habitants. La commune la plus peuplée, les Abymes compte à peine plus de 50.000 âmes. Pour suivre la voie tracée par le Conseil d’Etat, l’arrêté devait donc imposer le port du masque non pas en fonction de l’existence de catégories d’établissements dans les rues mais en fonction de l’importance de la fréquentation des rues et de l’impossibilité ou des difficultés objectives à y respecter la distance préconisée entre les individus.
Par ailleurs, si l’utilité du masque est admise par la communauté scientifique pour freiner la contamination dans les lieux clos, il n’en est pas de même pour les espaces extérieurs comme notamment les rues et le risque pour la santé induit par le port prolongé du masque, particulièrement en zone tropicale, commence à être évoqué, lui aussi, par la communauté médicale.
Il serait utile que le Conseil d’Etat soit saisi d’un appel de l’ordonnance du juge des référés de Guadeloupe. Seuls les requérants de 1ère instance peuvent le saisir…A bon entendeur, salut !