Stress hydrique ? Stress hydrique dans notre archipel. Est-ce plausible ? La Guadeloupe, l’île aux Belles Eaux ! Le slogan serait-il trompeur ? Triste et navrante réalité. De façon systématique, des coupures d’eau sont organisées dans les communes, et par un joli euphémisme, sont appelées “tour d’eau”. Ces coupures durables touchent et gênent la quasi-totalité de la population. Comment et pourquoi ? Il faut se rendre à l’évidence. Sur l’eau on a tout dit. Sauf le reste !
Il suffit que quelqu’un veuille vraiment quelque chose pour que cela se produise. Nous ne croyons pas, au Progrès Social aux malédictions. Et encore moins à la déraison de notre peuple. Le stress hydrique affectant les familles et les professionnels, est-ce la fòt de la nature, des consommateurs ne payant pas leur facture ? Que nenni ! Vigilance, vigilance. Le carême approche et une insuffisance chronique en pluie est à craindre après un hivernage abondant. La météo comme le vent ne sait pas lire. Sé kouto sèl ki sav ka i ka pasé an kè a jiromon.
Le constat est terrible. Et connu de tous. Les questions qui ont soif de réponses, restent en suspens ! Quand les foyers de notre archipel, même en hivernage, ne sont pas approvisionnés en eau potable. Quand nos ressources en eau, ne répondent plus ni aux besoins humains, ni aux besoins agricoles et de l’élevage. Quand l’irrigation en Guadeloupe concerne plus de 6 600 hectares. Quand les périodes de carême deviennent capricieuses et que la moindre petite période de sécheresse devient problématique, même pour la ressource ? Quand avec le mille feuilles du découpage de notre territoire, l’intérêt général “Guadeloupe d’abord” passe après les intérêts politiciens, électoralistes et des lobbies. Quand l’eau paie tout sauf l’eau. Quand comme sœur Anne, lassés des grandes messes en préfecture ou en Région, on ne voit toujours rien venir, sinon, encore d’autres rigidités. Oui. Il est légitime de se demander si les Guadeloupéens sont à l’abri d’un stress hydrique.
Pour rappel (nous en avions déjà parlé dans notre numéro du 7 juillet 2012), on parle de pénurie d’eau ou stress hydrique quand la demande en eau dépasse les ressources disponibles. Entrent dans cette catégorie les pays dont la disponibilité en eau par an et par habitant est inférieure à 1 700 m3. En dessous de 1 000 m3/hab/an, on parle de pénurie d’eau. Il convient de rappeler que la consommation quotidienne d’eau potable des Guadeloupéens, est d’environ 213 litres en moyenne par habitant contre 150 litres dans l’Hexagone. L’agriculture est l’une des filières qui nécessite les besoins les plus importants en eau non potable. Elle emploie 12 % de la population active et contribue au produit brut régional à hauteur de 6 %. La Guadeloupe compte environ 9000 exploitations agricoles aux superficies allant d’un hectare jusqu’à plus de vingt hectares pour des cultures variées : canne à sucre, banane, cultures légumière, fruitière et florale, mais également les productions animales : bovins, porcins, caprins, ovins et volailles.
Face à des poussées démographiques, urbaines, touristiques, et industrielles toujours plus fortes, notre archipel comme d’autres pays, doit aujourd’hui faire face à une demande en eau potable de plus en plus importante. Dans les zones de stress hydrique, l’eau est bien plus qu’une ressource naturelle : elle devient un enjeu.
Et ce surtout, quand certains Guadeloupéens (élus et consommateurs) de nos massifs montagneux, entendent avoir un statut privilégié au détriment d’autres Guadeloupéens de la Grande-Terre, de la Désirade et de nos îles du sud.
On ne comprend toujours pas, avec une telle pluviométrie, qu’on puisse recourir au dessalement onéreux de l’eau de mer et aux forages des nappes souterraines. On ne saurait terminer sans rappeler les conséquences d’une pénurie d’eau sur la végétation (en termes de croissance et de développement).
Claude Edmond a ici raison dans son vibrant plaidoyer pour le réveil citoyen (Goubè an nou N°3). “En Guadeloupe nous avons une société civile incroyablement imaginative mais désarçonnée par des dirigeants successifs aux objectifs vertueux et aux cheminements tortueux”.
Rappelons que le stress hydrique entraîne également une dégradation des ressources en eau douce. Ces dernières voient leur quantité baisser en raison : d’une surexploitation des eaux souterraines ; de ruisseaux et rivières asséchées à cause d’une exploitation en amont anarchique et de constructions tous azimuts.
Attention à la qualité de cette même eau douce qui peut être dégradée en raison de la pollution par des matières organiques ; d’une possible pollution de l’écosystème aquatique qui est asphyxié, notamment par la présence d’algues ; d’intrusions salines. C’est là une affaire au même titre que le chlordécone une question de santé publique.
Oui encore et encore, ce problème de l’eau va faire l’objet de toutes les attentions durant les campagnes électorales qui s’ouvrent. Quand on ne sait pas, on ne se pose pas trop de questions. Mais sur l’eau, on commence à disposer de bons nombres d’explications. Plus tortueuses que vertueuses. Comment ne pas exiger dès lors à tout prix, de tout savoir et tout comprendre.”
Il ne serait pas étonnant que la population lassée d’attendre ne se fasse définitivement entendre par les voies et moyens à sa disposition c’est-à-dire des blocages et des barrages. Si il faut en venir là pour faire entendre raison à nos élus. A bon entendeur…
Rodes Jean-Claude