Un accord a donc été signé en Martinique le mercredi 16 octobre.

Non pas un accord final sur la baisse des prix mais un catalogue d’intentions sur les voies et moyens pour parvenir à des prix qui ne dépasseraient pas de plus de 15 à 20 % ceux pratiqués habituellement dans l’Hexagone. Problème numéro 1, c’est que l’entité revendicatrice, le RPPRAC, n’a pas validé cet accord, et il n’est pas le seul. La grande distribution n’ayant eu de cesse au cours de ces négociations de pratiquer le chantage à l’emploi et l’occultation du vrai mécanisme de formation des prix. In fine la plus grande partie des efforts a porté sur les collectivités et l’Etat, et au final sur les contribuables-consommateurs.

Le second problème qui va impacter dans le futur les collectivités et leurs élus c’est que ces négociations ont abouti à faire croire que l’octroi de mer était l’unique et la principale cause de la flambée des prix. M’inscrivant en faux de cette analyse, et en assumant mes responsabilités, j’écrivais dans ces colonnes il y a trois semaines « À long terme, la lutte contre la vie chère passe par une remise à plat des circuits de distribution avec la transparence totale et le contrôle permanent sur les prix et les marges depuis le producteur jusqu’au consommateur final. C’est la seule condition pour que le consommateur paye enfin le prix juste ».

Plusieurs exemples permettent de s’en convaincre. Lorsqu’on additionne la TVA (8,5 %) avec l’octroi de mer sur les produits alimentaires, il est rare que l’on dépasse 16 %. Or en France, la TVA est bien supérieure puisqu’elle est à 20 %. Autrement dit, il n’existe pas de surtaxation aux Antilles. La situation en Guyane le confirme puisqu’il n’y a pas de TVA dans ce territoire et il s’avère que les prix des produits sont plus élevés qu’aux Antilles.

Autre exemple patent, celui des produits d’équipement sportif. Un rapide comparatif entre les prix pratiqués dans en région parisienne et dans un grand centre commercial bien connu de Destrellan permet de constater qu’il n’existe qu’un faible écart de prix (qui correspondrait sans doute aux frais de transport).

La question se pose et doit être posée. Pourquoi ce qui est possible sur les chaussures de sport ne l’est pas sur un paquet de pâtes alimentaires ? Sans doute parce que sur ce marché la concurrence existe (même le plus petit magasin de sport peut s’approvisionner directement en France, aux États-Unis voire en Chine, sans compter la possibilité d’acheter sur internet ce qui ne l’est pas pour un paquet de lessive). Tandis que du côté de l’alimentation, il n’y a que pratiques monopolistiques, opacité et cumul des marges. Nous n’évoquerons de nouveau ici le verrouillage mis en œuvre dans le secteur de l’automobile par deux ou trois groupes. Un vrai cartel !

Il faut également rappeler que par nature l’octroi de mer est aussi un outil de gestion locale de la fiscalité. Préconiser son remplacement par la dotation globale de fonctionnement de l’État c’est non seulement perdre en autonomie mais c’est surtout se mettre sous la tutelle de l’État, de surcroît endetté, aux abois et qui se doit absolument de réduire les déficits budgétaires. On dispose à cet effet de nombreux exemples comme le RSA qui est toujours plus faible aux Antilles qu’en France.

Face à cette situation, l’idée qui fait son chemin pour lutter contre la vie chère est de sortir progressivement de la totale dépendance vis-à-vis des importateurs. Autrement dit, mettre en place les conditions pour parvenir à la souveraineté alimentaire, diversifier les sources d’approvisionnement et rompre avec les privilèges de ces lobbies coloniaux. L’objectif étant de parvenir, à la fois, de satisfaire les consommateurs locaux et de permettre à nos producteurs de vivre de leur labeur.

Pour rappel, il faut se remettre en mémoire qu’il y a une vingtaine d’années nous étions autonomes en œufs et en productions vivrières. Nos éleveurs fournissaient la moitié de la viande de porc.

Il est donc possible à la fois d’inciter les consommateurs à s’orienter vers des produits locaux en changeant s’il le faut les goûts et les modes de consommation et en valorisant nos produits. Parallèlement, il s’agit de relever le défi de la production locale. Par un effort collectif on peut donner des garanties de vente aux producteurs leur permettant d’augmenter leur production et de baisser les prix.

Plutôt que de vouloir inciter la population à sombrer dans le populisme des illusions sans réalité, avec des lendemains qui déchantent, ne faudrait-il mieux se concentrer sur des solutions positives, concertées et pérennes.

Nul ne peut ignorer que la situation économique et sociale de la Guadeloupe demeure extrêmement fragile. En particulier dans le BTP (gros pourvoyeurs d’emplois) avec la fin du chantier du CHU.

Que ceux qui pensent Guadeloupe et qui aspirent à diriger ce pays, se ressaisissent. Qu’ils canalisent leur énergie à l’édification de solides fondations durables, s’inscrivant dans la lucidité et le réel. L’intérêt du pays et de notre jeunesse l’exige ! Le Dire, comme l’activisme, n’est pas le Faire. C’est bien au pied du mur qu’on voit le maçon

Rodes Jean-Claude

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