Une crise mondiale en cours de résolution ?
La banane est le fruit le plus consommé au monde après le blé, le riz et le maïs. Elle est cependant aujourd’hui confrontée à une crise majeure. Car la variété Cavendish, la plus commercialisée, est attaquée par le Fusarium Oxysporum Cubense Tropical Foc4, un champignon dévastateur.
Pour mémoire, cette menace rappelle l’histoire de la variété Gross Michel, disparue dans les années 60 à cause de la fusariose du bananier. C’est à croire que les leçons du passé n’ont pas été suffisamment retenues, et la recherche n’a pas bénéficié des investissements nécessaires pour anticiper une nouvelle épidémie.
L’épidémie de la Cavendish, apparue à Taïwan en 1968, s’est propagée en Océanie, en Asie, au Moyen-Orient, en Afrique, et en 2020, elle a atteint Mayotte.
En 2023, 22 pays sont confrontés au Foc4, et même les Antilles sont désormais menacées. Ce champignon s’attaque aux vaisseaux conducteurs de sève du bananier, provoquant le jaunissement des feuilles et la mort du plant. La propagation se fait via les eaux d’irrigation, les outils, les chaussures, les animaux, les véhicules, et même par les vents.
Face à cette crise, le professeur Gert Kema et son équipe à l’Université de Wageningue aux Pays-Bas se sont mobilisés pour comprendre la maladie et développer de nouvelles variétés de bananes résistantes. Ils ont décodé le génome du Fusarium et cherchent à ralentir l’épidémie tout en créant des variétés capables de résister au Foc4.
A mentionner que dans la « Food Valley » autour de l’université, des start-up comme KeyGene travaillent sur la généalogie de la banane. Le Dr. Fernando Garcia-Bastidas, spécialiste en biologie végétale, utilise des serres contrôlées par ordinateur pour identifier les ancêtres de la Cavendish. En croisant des variétés résistantes avec celles appréciées des consommateurs, ils cherchent ainsi à créer une nouvelle variété capable de résister au Foc4.
Cependant, la crise de la banane ne se limite pas à la Cavendish. Une autre menace, la jaunisse fusarienne, affecte principalement cette variété et met en danger plus de 100 milliards de bananes consommées chaque année dans le monde.
Détectée en 1997, elle se propage lentement, mais certains scientifiques estiment qu’il faudra encore une décennie avant que son impact ne soit drastique.
Les chercheurs explorent diverses solutions, y compris le génie génétique avec des variétés résistantes comme le QCAV-4. Cependant, des experts soulignent que ces solutions pourraient ne pas être durables à long terme, et la clé pourrait résider dans la diversification des cultures pour éviter la monoculture vulnérable.
En Afrique, où la banane est devenue un produit d’exportation majeur, la situation est également préoccupante.
La standardisation de la variété Cavendish a rendu la filière vulnérable aux maladies, mettant en danger la production et les emplois. Les efforts pour diversifier la production et développer des variétés résistantes sont cruciaux pour assurer la durabilité de la filière.
Si la banane fait face à une crise existentielle, il est heureux que la science et l’innovation laissent entrevoir des solutions prometteuses. La recherche intensive sur le génome de la banane, la diversification des variétés, et des pratiques agricoles durables seront- elles les clés pour surmonter cette crise et assurer l’avenir de ce fruit mondialement apprécié ?
DURIZOT JOCELYN