La commission des affaires juridiques et communautaires de la collectivité a émis un avis défavorable au projet de loi sur la biodiversité, considérant que les intérêts des départements d’outre-mer concernant la régulation de l’accès aux ressources génétiques n’étaient pas suffisamment pris en compte.
Rappelons que le projet de loi relatif à la biodiversité vise notamment à mettre en œuvre les obligations découlant des conventions internationales signées par la France, dont celle sur la diversité biologique de 1992, ainsi que les obligations découlant du Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages, signé par la France le 20 septembre 2011.
Cependant, le dispositif qui intéresse principalement les Outre-Mer concerne l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation (APA). Il s’agit ainsi de la mise en œuvre par la France du protocole de Nagoya qui permet aux Etats signataires de réglementer l’accès à leurs ressources génétiques pour profiter du partage des avantages découlant de l’utilisation de celles-ci, et affecter lesdits avantages « à la conservation de la diversité biologique et à l’utilisation durable de ses éléments constitutifs ».
Ce principe s’applique également aux connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques détenues par les communautés dites « autochtones et locales », les avantages bénéficiant à la communauté détentrice.
Le projet de loi prévoit une régulation de l’accès aux ressources génétiques par la mise en place d’un régime d’accès et de partage des avantages, afin d’éviter la bio-piraterie des ressources génétiques. Il s’agit de subordonner l’utilisation des ressources génétiques et/ou des connaissances traditionnelles associées à ces ressources à des conditions de déclaration ou d’autorisation.
Ainsi, l’accès aux ressources génétiques en vue de leur utilisation à des fins de connaissance sur la biodiversité, de conservation en collection ou de valorisation sans intention directe de développement commercial est soumis à déclaration. Tandis que l’utilisation des ressources à des fins commerciales sera soumise à un régime d’autorisation préalable.
Par conséquent, au terme de ce projet de loi, l’accès aux ressources génétiques serait régulé pour toute la biodiversité française, mais selon des modalités différentes: l’essentiel des demandes en particulier les projets de recherche fondamentale, relèvera d’un régime déclaratif, et seuls les projets qui le justifient réellement, par exemple les projets d’utilisation des ressources génétiques à des fins commerciales seront soumis à autorisation.
Rappelons sur ce point que dans une correspondance en date du 30 décembre 2013, le Sénateur et Président du Conseil Général, Jacques GILLOT avait interpelé le Ministre de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie, sur ce même projet de loi.
En effet, si l’exécutif départemental a accueilli avec faveur l’arrivée d’un texte législatif renforçant les dispositifs réglementaires existants sur la biodiversité, il a affiché son inquiétude vis à vis du dispositif d’accès aux ressources génétiques pour toute la biodiversité sauvage française.
Les conditions d’octroi des permis soulèvent localement de grandes interrogations au regard du principe d’égalité devant la loi, mais aussi au regard de la sécurité juridique. Ainsi, les porteurs de projet de recherche fondamentale en seraient exonérés alors que tous les autres opérateurs (du vendeur sur le marché aux laboratoires pharmaceutiques) seraient soumis à l’obligation d’un permis, sans que la question du coût de ces autorisations ne soit évoquée.
Par conséquent, le sénateur Gillot a estimé qu’il serait plus opportun de sécuriser les conditions de prélèvement dans le milieu naturel et de soutenir la durabilité de l’espèce, par la culture. Dans tous les cas les notions d’espèces sauvages ou cultivées méritent d’être clarifiées, compte-tenu des incidences financières qui en découlent.
Enfin, Jacques GILLOT a regretté que les connaissances ancestrales des îles de Guadeloupe collectées au sein de TRAMIL n’aient pas été prises en compte dans le projet de loi, au même titre que la Guyane, la Polynésie Française et la Nouvelle-Calédonie. Ces travaux visent à créer une banque de données interactive sur les habitudes socioculturelles des Caribéens, en matière de soins de santé primaire par les plantes médicinales, dans un objectif de préservation et de valorisation d’une pharmacopée caribéenne et ont plus globalement, impacté le développement économique et la lutte contre le chômage, en favorisant l’émergence de petites unités de production.
Jacques GILLOT a par conséquent demandé au Ministre de l’Ecologie de tenir compte des alertes exprimées afin d’intégrer au projet de loi, les précisions nécessaires à une gestion équitable de la biodiversité en Guadeloupe, préservant au mieux les intérêts économiques des acteurs locaux de la filière plantes et reconnaissant nos savoirs ancestraux.